NOS CARRIERES : Une histoire passionnante et mouvementée
Comblanchien
! A l’énoncé du nom de notre village, un mot vient immédiatement à l’esprit : la
pierre ! Ce matériau recherché par l’homme depuis des lustres, n’a été extrait à
Comblanchien, d’une façon régulière et lucrative, qu’au cours de la première
moitié du 19° siècle. En effet des carrières sont déjà exploitées à Corgoloin,
Aloxe et Nuits et surtout à Ladoix où les carrières s’étendent sur sept hectares
en 1820 ! Il en est de même a Premeaux au 17° siécle.
A Comblanchien, la pierre est extraite de quelques « trous » disséminés dans les quelques 125 hectares de forêt que comporte la commune au début du 19° siècle. C’est le cas de trois carrières relouées en 1807, 1811 et 1829, qui figurent en tant que forêt sur le premier cadastre parcellaire de 1829, et situées au- dessus du vignoble de Bellevue et des Vaucrains.
Malgré la location (on disait amodiation) de ces trois carrières, la commune de Comblanchien est très pauvre ; En ce mois de novembre 1844, elle doit régler un tiers de l’acquisition d’un bâtiment situé sur la place du village, afin d’y aménager un école, un logement pour l’instituteur, et la maison commune( actuels logements communaux) .Il lui faut donc trouver de nouvelles ressources, car il n’est pas question de voter de nouveaux centimes additionnels( nos taxes foncières actuelles) qui viendraient encore aggraver le sort de nombreuses familles.
Le maire, François Guillaume-Gille et son conseil municipal ne restent pas « de marbre » devant la pierre de qualité extraite de deux carrières exploitées sur deux terrains privés appartenant respectivement à Monsieur Pierre Viénot, maire de Premeaux, et à Monsieur Claude Guillemard et son associé savoyard Paul Bochaton.
Est-ce le déclic qui va pousser les édiles municipaux à louer des terrains afin d’y exploiter des carrières ? Toujours est-il qu’ en ce jour du 10 novembre 1844, la municipalité décide d’amodier des emplacements pour ouvrir des carrières. Ce sont des terrains incultes, recouverts d’une herbe rase, parsemés ça et là de buissons épineux , de buis, impropres à toute culture. Quelques vieux noyers, source de revenus communale à la fin du 18° et début 19° siècle, et rescapés de l’abattage général, car, disait-on, qu’ils attiraient la foudre et la grêle, dressent encore leurs branches demi décharnées.
Ce jour mémorable du 10 novembre 1844, marque donc le départ de la grande aventure des carrières de Comblanchien, de cette pierre de qualité qui s’exportera dans le monde entier, écrira l’histoire, et fera la renommée du village et sa prospérité dès la fin du 19° siècle !
Le premier terrain est loué le 24 novembre 1844 à Monsieur Claude Dechaume, tailleur de pierres à Comblanchien ; sa superficie est de 18 ares, et il est loué pour 18 ans.
Les clauses et conditions du bail comprennent 10 articles, et l’amodiation se fait aux enchères et à l’extinction du troisième feu. Pour cette première location, la mise à prix est fixée à 20 francs. Le premier enchérisseur, l’instituteur, Didier Miot est monté à 22,50 francs, et aux deuxième et troisième feux, Claude Dechaume, seul enchérisseur l’a emporté pour 25 francs par an. La caution solidaire et solvable est assurée par Monsieur François Girard-Tardy, vigneron à Comblanchien.
Aujourd’hui, cette carrière se situerait, tout de suite à droite de l’ancien chemin de Comblanchien à Chaux, à côté de la barrière de l’ancienne décharge municipale.
A partir de 1845, onze nouvelles carrières vont s’ouvrir à gauche de la carrière ci-dessus, sur le chaume communal, jusqu’au chemin de Comblanchien à Villers la Faye construit en 1855, mais aussi au-dessus des Vaucrains et de Bellevue ( partie zone artisanale actuelle ). Les carrières sont délimitées par le maire, avec au préalable l’autorisation de l’administration des Forêts. Chaque concession est séparée par des bornes, et des murs de 1 mètre de haut et 60 centimètres de large doivent être construits au nord des carrières, pour éviter tout accident lors du passage de la vacherie communale qui va paître sur le chaume (vestiges encore visibles à gauche de la zone artisanale)
La publicité relative à la location de ces exploitations se fait par voie d’affichage dans les communes voisines, aussi, les locataires se nomment : Tissier, Fleuriet, Moingeon à Premeaux, Finet-Fort, Leblanc à Comblanchien, Carpentier à Nuits .Seuls, deux exploitants sont originaires, l’un du département du Doubs, l’autre de Paris. En 1861, l’arrivée des frères Rossi du Tessin (canton suisse italien ) et de leurs trois neveux, va donner un début d’élan aux carrières, en apportant de nouvelles connaissances en matière d’extraction. Embauchés tout d’abord à la carrière Dechaume, ils sont, le 17 avril 1864, locataire d’une carrière.
Les superficies des carrières exploitées s’échelonnent de 13 ares à 18 ares jusqu’en 1855, pour aller à 1 hectare en 1870. Il en va de même pour le montant des loyers. Les recette inscrites au budget de 1847 s’élèvent à 139,50 francs, contre 2.222,83 francs au budget de 1871 !
Durant la période étudiée au cours de ce premier volet de l’histoire des carrières, celles-ci sont louées pour 18 ans, sauf celle louée en 1862 à Ernest Bazin, marbrier, originaire du Doubs pour une durée de 25 ans. Nous verrons par la suite, que certains baux ne seront pas menés à terme par leurs locataires d’origine, mais repris par d’autres, voir sous- loués.
En 1869, la hauteur de pierre exploitable est d’environ 10 mètres, recouverte de terre végétale, puis de bancs de 2 à 4 mètres de roches brisées mêlées de terre rouge.
L’exploitation assurée par des tailleurs de pierre( le mot carrier n’est jamais employé à cette époque) est assez rudimentaire et manuelle. Elle le sera pendant de nombreuses décennies !
La pierre façonnée, sur l’aire des carrières, est transformée en dallage, dalles funéraires, équarries à la chasse, moellons, bornes, pierre cassée pour l’entretien des chemins. En 1846-47, la commune passe commande de 140 mètres de dallage et pierre mureuse, pour la construction d’un aqueduc dans la grande rue et la rue de Pleurey, nécessaire à la canalisation des eaux de ruissellement qui rendent ces rues boueuses. Le sciage mécanique se fait à Dijon en 1863, par un nommé Julien Ménégoz, « maître d’usine à vapeur » qui reprend le bail de Bazin à cette date. La force hydraulique est également utilisée par un nommé Champonois qui exploite une scierie de pierres construite sur la rivière la Béze à Cussigny depuis le 18° siècle.
A partir de 1850, l’arrivée du chemin de fer dans la région (compagnie PLM ) va contribuer à l’essor des carrières. La pierre est utilisée dans les ouvrages d’art que la compagnie doit construire (piliers de pont, murs etc. ).En 1852, la pierre de Comblanchien entre également dans la construction de l’église Saint Denis à Nuits.
A partir de 1872, un virage important et prometteur s’amorce pour nos carrières.
Jacky Cortot
Dans le prochain bulletin municipal : 1872-1899 : Un grand départ…